Éternel

Mon soleil, ma dune, mon été,
Mon hiver, mon ciel, mon rocher,
Doucement comme un rêve éveillé,
Tu cheminais sur mes sentiers.
J’ai voulu, j’ai rêvé, j’ai aimé,
Mon soleil, ma dune, mon été,
Ma mer, mon île, mon alizé,
Et toujours je t’aimais.
Ma mer, mon île, mon alizé,
Mon soleil, ma dune, mon été,
Silencieux, tu glisses désormais
Radeau frêle sur des eaux glacées.
J’ai cherché, j’ai trouvé, j’ai aimé,
Mon soleil, mon été, mon alizé,
Mon île, ma mer, mon rocher,
Pour une vie, pour un siècle, pour une éternité.

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L’heure des amants

1, 2, 3
Tournent les aiguilles du temps 
4, 5, 6 
Laisse vivant cet instant
7, 8, 9 
Demain je m'en irai
10, 11, 12 
Ce soir je veux t'aimer. 

Tes mots me brûlent
Tic-tac tic-tac fait la pendule.

1, 2, 3 
Je veux encore et encore
4, 5, 6
Ton parfum sur mon corps.
7, 8, 9
Un incendie dans tes yeux
10, 11, 12
Et c'est moi qui prends feu.

Tes mots me brûlent.
Tic-tac tic-tac fait la pendule.

1, 2, 3
Filent les heures des amants
4, 5, 6 
À la maison ta femme attend.
7, 8, 9 
Va ! Le dîner est bientôt prêt
10, 11, 12
Qu'importe ! J'ai fini de t'aimer.

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Renaître

J'ai perdu mon temps en futilités
Vendu des assurances vie
Répondu à des appels d'offres
Inventé des slogans mauvais
Rempli des cases
Tracé des lignes.
         Ce matin c'est décidé ! 

En ouvrant les volets
Le bouquet de marguerites était là
         Planté
Au milieu des herbes sèches.
Il se dressait fier et droit
Sa corolle de mariée
Son cœur de citron
Sous un ciel sans nuages.

J'ai respiré
Toutes ailes déployées
Gonflé les poumons
Ouvert grand les bras
Le soleil était franc
Il me regardait.

         Ce matin j'ai décidé ! 

Je n'ai plus de temps pour les futilités
Le temps qui vient
Celui qui reste
Est trop précieux. 
Je le consacrerai désormais
A l'important, à l'essentiel
A ce que la vie fait de mieux.

Je passerai des heures avec les papillons
Coulerai des après-midi entières
Dans le gai piaillement des oiseaux
Lirai du soir au matin
Les cent et un ouvrages
En retard et relirai tous les autres
La prose de Zweig, de Fitzgerald
La poésie de Plath, de Dickinson, de Tsvetaïeva.

Je marcherai longtemps par les sentiers
J'irai voir la mer
Me barbouillerai la tête de ses bleus
Azur turquoise et indigo.
Je reviendrai à la nuit tombée
Après m'être enivrée de guitares flamencos
Je passerai par les ruelles brûlantes
De juillet. 

Je dormirai toutes fenêtres ouvertes
         Bercée
Par le coassement des rainettes
Par le ululement de la chouette
Je laisserai le matin s'infiltrer par les persiennes
Ma peau à la caresse du soleil montant
J'enfoncerai dans les coussins mon visage
Encore ensommeillé et tout pâle
Je me régalerai des premières vapeurs
Du café chaud et fumant.

Rien ne sera jamais plus inutile
         Fut-il.
Chaque nuit verra poindre une lune nouvelle
Dans les draps blancs parfumés
D'épis de lavande. 
Chaque jour s'offrira en cadeau 
Sur le seuil de la porte
Frappera le rayon joyeux
         Des saisons
De printemps en hiver
D'automne en été
L'étendue de mes rêves
Sera le chemin.

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Quand tu chantais

Il y a ces voix qui se mêlent
Il y a ta voix surtout
Ta voix qui résonne 
Et reprend les moulins de mon cœur. 

Il y a tes bras aussi 
Tes bras qui sont si loin déjà
Et il y a mon cœur
Qui tourne en rond
Qui réclame et qui s'affole. 

Il y a mon cœur
Comme un tournesol
Et tu chantes
Tu chantes encore
Comme tu chantais hier 
Pour bercer mes nuits
Pour accompagner d'un filet de voix
Le sommeil qui ne venait pas.

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Du temps

Je veux du temps
Pour aimer
Et chanter. 
Du temps 
Pour danser
Et rêver. 

Je veux du temps
Pour un peu de ciel bleu
Du temps 
Pour vivre tout à fait
Pas juste assez. 

Je cours
Du café au bureau 
Du déjeuner au bistrot.
Je cours
De rendez-vous en réunions
De dîners en réception. 
Je cours
Pour me donner l'illusion
D'être vivant. 

Mais je ne suis qu'un astre mort
Une étoile qui a tout brûlé. 
J'ai perdu du temps
Cherché à le rattraper
A vouloir le consommer
Et même le dépasser.

Du temps ! 
Donnez-moi le temps
De vivre toutes les années
De croiser vos routes
Sur des chemins creux et cabossés.

Je veux vivre encore
De vin 
De corps à corps
De sons là-haut perchés
De poésie d'amour
D'hiver en été. 

J'ai perdu tant d'années
A courir d'urgences
En sottes croyances
A me laisser dicter la loi
Des majorités
Celles qui vous disent où il faut être
Mais jamais ce que c'est d'être
Vivant. 

Je perdu tout ce temps
Si précieuses les heures
Si belles les heures
Sous les pommiers
De mon enfance
Dans le grenier
Où dorment nos vacances. 

Je veux du temps ! 
Maintenant
Pour chaque instant présent. 
Du temps
Pour marcher à pas lents
Et m'arrêter souvent. 

Je veux du temps
Maintenant ! 

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Les naufragés

La nuit s'habille de nos étreintes délurées
Et sous l’œil des souvenirs indiscrets
Nos bouches se délectent de nos chairs parfumées. 

Le lit chavire sous la houle agitée
De nos corps déchaînés, 
Et nous voilà vidés à bout de souffle
Naufragés. 

Dors mon amour, dors !  

La bougie n'en finit plus de brûler
Et sa cire coule, 
Coule encore le long du chandelier.

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L’aquarelliste

Sa main vole glisse sur le papier
Telle une plume dans le vent.
A bout de pinceau avec la précision d'un archet
Il caresse la toile de ses gestes élégants.
De ses doigts enroulés tentacules serrés
Il balade l'instrument sur les courbes du temps.
Dans une danse rapide et toujours maîtrisée
Il invente des visions des ailleurs éclatants.
Le regard plein de ses rêves colorés
Il n'a d'yeux que pour elle. Ah ! Maudite aquarelle ! 
J'ai beau me presser lascive à son côté
Je suis bien peu de chose la rivale est trop belle.
De nuits lourdes d'insomnie en matins endormis 
Le ballet de ses mains lui concède mille caresses. 
Et jusque dans mes rêves où là aussi il m'oublie
Je croise le fer avec son insolente maîtresse.

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