De la fin d’un principe fondateur

Au prix d’une énième contradiction, le Conseil constitutionnel, comme le Conseil d’État avant lui, s’est parjuré. Plus aucune instance, au pays de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ne garantit plus les droits naturels et inaliénables de l’homme ainsi que le principe de la liberté.

Jusqu’alors la liberté était le principe et la restriction de police, l’exception. Ce principe fondateur de toute société libre et démocratique vient de tomber. Est-il tombé le 16 mars 2020, quand, par la décision d’un seul homme, 67 millions d’individus ont été sommés de s’enfermer chez eux et de n’en sortir que dans des cas limitatifs, munis d’une attestation sur l’honneur et surveillés par les forces de police ? Est-il tombé le 12 juillet 2021, quand le même homme a intimé l’ordre à 67 millions d’hommes et de femmes, déjà plus tout à fait libres, d’aller prendre leurs doses au centre de vaccination, chez leur médecin ou leur pharmacien alors même que cet acte médical n’est rendu obligatoire par aucune loi de la République ? [1] Est-il tombé le 17 décembre 2021, quand le valet du monarque absolu a annoncé que tous les Français de plus de 12 ans non à jour de leurs doses n’auraient plus accès à tous les lieux de la vie sociale, culturelle et publique ainsi qu’aux transports publics ? Est-il tombé le 4 janvier, quand la France entière a découvert dans les colonnes d’un journal, que le sinistre occupant de l’Élysée avait pour projet d’emmerder les quelques millions de Français qui n’avaient pas répondu à son ordre du 12 juillet 2021 et qu’en conséquence ces irresponsables ne méritaient plus le titre de citoyen ni les droits attachés à cette citoyenneté ?

Quand ? Quand est-ce que tout a basculé ? Quand l’emmerdeur en chef a parlé ou quand chaque pouvoir et contre-pouvoir se sont couchés ? Quand l’emmerdeur en chef a ordonné ou quand le Parlement a abandonné le peu de prérogatives qui lui restait ? Quand l’emmerdeur en chef a imposé ou quand les garants de la Constitution et des droits fondamentaux ont cessé de les protéger ? Quand l’emmerdeur en chef a éructé ou quand la majorité docile ou résignée a accepté, d’une part que ses libertés soient conditionnées à la prise d’un traitement médical, d’autre part, que quelques millions de ses compatriotes soient mis au ban de la société, traités comme des sous-citoyens, relégués et interdits de fréquenter des pans entiers de l’espace public ?

Quand ? Quand est-ce que nous sommes devenus collectivement une masse apathique et lâche qui marche au pas, rampe et détourne le regard ?


[1] Article 5 de la DDHC de 1789 : « …nul ne peut être contraint à faire ce qu’elle [la loi] n’ordonne pas »

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Liberté, je continuerai d’écrire ton nom

Comme au bon vieux temps du maccarthysme, ou plus loin encore, de la terreur révolutionnaire, chacun doit aujourd’hui apporter des gages. Dans l’Amérique du sénateur McCarthy, le gage était de prouver son anticommunisme viscéral, dans la France de 1793, il était d’être un antiroyaliste forcené. Dans la France covidiste de 2021 il faut affirmer haut et fort, avant toute prise de parole, que « bien évidemment, je suis pour le vaccin ! ». Mieux encore. Depuis les déclarations d’Emmanuel Macron le 12 juillet dernier, il est devenu coutumier, après avoir salué son interlocuteur, de lui demander s’il est vacciné, la seule bonne réponse étant « oui », même si un « pas encore, mais j’ai pris rendez-vous pour recevoir ma première dose » est admis. Aucun argument sur ce que nous vivons actuellement ne saurait être audible, avant d’avoir prêté allégeance à la sainte vaccination et ses grands-prêtres que sont les professeurs de médecine et autres sachants en blouses blanches.

Alors permettez-moi – ou pas d’ailleurs, mais peu m’importe puisque en tant qu’individu libre, je n’attends aucune autorisation pour déroger à cet air du temps devenu irrespirable – de refuser de me prosterner devant l’autel vaccinal et de vous faire part de mon bilan de santé, qu’il concerne mon taux de triglycérides, le résultat de mon dernier frottis ou l’état de mes vaccinations, avant de m’exprimer sur cette folie collective qui semble s’être emparée de nous. Parce que soyons lucides, l’affaire qui nous occupe désormais n’est plus sanitaire. Elle est politique ! Elle est juridique ! Elle est de principe !

Ce que nous vivons depuis dix-huit mois, à l’occasion de cette crise sanitaire, c’est le saccage méthodique de l’État de droit, un saccage qui atteint son acmé avec l’instauration du funeste passeport sanitaire. Depuis mars 2020, nous avons abdiqué une à une nos libertés fondamentales. Sidérés, effrayés par la menace d’un virus exterminateur – menace que l’on sait aujourd’hui largement fantasmée et instrumentalisée -, par les déclarations de guerre d’un chef de l’État se prenant pour un général des armées – général de pacotille qui n’a même pas fait son service militaire – envoyant ses troupes sur le champ de bataille sans bouclier ni arme tandis que lui reste au quartier général, nous avons tout accepté : l’enfermement (il faut cesser d’utiliser la sémantique euphémisée du pouvoir), le contrôle de nos déplacements, de nos caddys, de nos paniers, de nos vies privées jusque dans nos deuils, les verbalisations abusives[1], la suspension de l’état de droit pour les personnes incarcérées en détention provisoire en attente de jugement[2] et même la validation par le Conseil constitutionnel de la violation de notre loi fondamentale[3] !

Alors vous me direz, après avoir avalé autant de couleuvres pourquoi ne pas en avaler une de plus ? Eh bien, ce n’est pas parce que l’anéantissement de la raison, provoqué par l’effet de sidération, a emporté notre consentement non libre et non éclairé que nous devons, dix-huit mois plus tard, continuer d’accepter l’inacceptable. Consentir, aujourd’hui, de justifier de son état de santé et de son identité pour entrer dans un restaurant, un cinéma, un théâtre, une bibliothèque, une salle de sport, une piscine municipale, un hôpital, une maison de retraite, un centre commercial, etc. c’est une atteinte totalement disproportionnée aux libertés individuelles, quoi qu’en dise le dernier avis du Conseil d’État du 19 juillet 2021 qui se déjuge et renie son ordonnance rendue 13 jours plus tôt (soit le 6 juillet) dans le cadre d’une saisine en référé liberté contre la loi du 31 mai 2021 instaurant la première version du passeport sanitaire. Jusqu’alors seul un officier de police judiciaire était habilité à demander à un individu de justifier de son identité. Depuis l’instauration du passeport sanitaire et son extension à venir, n’importe quel patron de bistrot, serveur de restaurant, ouvreur de cinéma, employé municipal assurant l’accueil du public dans une piscine municipale, gérant de salle de sport pourra se transformer en officier de police judiciaire et vous demander vos papiers. Chaque citoyen sera potentiellement et à n’importe quel moment, dans ses activités du quotidien, soumis à la surveillance d’un autre citoyen, et à une conformité sanitaire décrétée par l’État.

Si cette société du chantage, de la menace et du contrôle généralisé qui s’assoit sur tous nos principes fondamentaux, ceux-là mêmes qui fondent l’État de droit, mais également la démocratie libérale, vous convient, alors ne changez rien, mais si comme moi, ce que la France de la Déclaration des droits de 1789 est en train de devenir vous donne la nausée, alors refusez simplement, mais fermement, de vous soumettre à ce projet politique dangereux.

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La Liberté guidant le peuple (Eugène Delacroix)

[1] https://n.survol.fr/n/verbalise-parce-que

[2] https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000041755529/

[3] https://blogs.mediapart.fr/paul-cassia/blog/270320/le-conseil-constitutionnel-dechire-la-constitution

Déconnecter

Carte d’identité biométrique[1], drones, caméras à reconnaissance faciale[2], passe sanitaire[3], identité numérique[4] ; à tout moment quelqu’un, quelque part, sait où nous sommes et ce que nous faisons, sauf pour qui vit au fond des bois sans Internet ni téléphone portable. Le rouleau compresseur des NTIC (Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication) détruit toute parcelle d’intimité sur son passage avec notre consentement rarement très éclairé. En effet, nous manipulons ces outils avec l’inconséquence de l’incompétence qui caractérise une large partie d’entre nous. En dehors des geeks et autres spécialistes du secteur, le français lambda – et j’en suis – utilise ces technologies sans mesurer le dixième du tiers de la moitié de leur puissance intrusive.

Dans un premier temps, nous avons vu dans ces NTIC une formidable opportunité d’ouverture sur le monde et la connaissance. La promesse a d’ailleurs été réalisée. Sans Internet, jamais je n’aurais été en contact avec des personnes vivant au Canada, en Afrique, en Russie ou en Océanie. Sans même aller à l’autre bout du monde, je n’aurais sans doute pas fait la connaissance de certaines personnes qui vivent simplement à quelques centaines de kilomètres de ma maison. Internet, c’est aussi la connaissance à portée de clic. Vous voulez tout savoir de l’histoire du Bas Empire ? Un moteur de recherche, un clic et la connaissance est là sur l’écran. Si vous préférez les livres, c’est toute une bibliographie sur la période qui vous est offerte. Encore deux ou trois clics supplémentaires et vous avez commandé, sur votre site de vente en ligne préféré, quelques ouvrages sur le sujet. Internet, ça a aussi été l’information autrement, pour le meilleur et pour le pire, il est vrai, mais quand je vois ce que sont devenus les médias officiels depuis quelques années, je me dis que ça valait la peine. Blog d’expression libre, sites d’information alternatifs, sites de créatifs en tout genre, etc. Internet ouvrait un champ des possibles extraordinaire.

Malheureusement l’outil technologique, comme souvent – comme toujours ai-je envie de dire, car la technologie n’est jamais neutre ; elle évolue dans un environnement, dans des structures sociales et économiques données – s’est retourné contre ses utilisateurs. D’abord, il est devenu un instrument d’aliénation. Il suffit de nous regarder évoluer, de voir le temps infini que nous passons sur nos écrans, à scroller, à zapper d’une info à l’autre. Notre capacité de concentration est en chute libre. Lire un texte de plus de dix lignes représente désormais un effort considérable pour nombre d’entre nous. D’ailleurs, combien êtes-vous à me lire encore dans ce troisième paragraphe, dans cette 28e ligne ? Je ne parle même pas des enfants qui sont nés avec un ordinateur, une tablette, un smartphone ou les trois à la fois dans les mains et qui n’imaginent pas leur vie sans ces prothèses.

Mais l’aliénation n’était peut-être pas la pire des étapes. C’est celle qui vient, celle qui est déjà là et préfigure un avenir sous contrôle numérique permanent qui me donne des sueurs froides, et à vous aussi, peut-être. Les outils numériques permettent désormais de nous suivre à la trace, à chaque instant, dans l’espace et dans le temps. Nos téléphones portables sont de véritables boîtes noires embarquées. Les caméras de vidéosurveillance à reconnaissance faciale ressemblent de plus en plus au Big Brother de 1984 ; he’s watching you, he’s watching us !  Les cartes d’identité biométriques, les QR code, les fichiers centralisés divers et variés qui conservent toutes nos données au nom de la sécurité de la nation, de la lutte contre le terrorisme et maintenant contre la maladie. Sans compter l’injonction qui nous est faite désormais pour tous les actes du quotidien, pour toute démarche administrative d’en passer par Internet.

Ça fait longtemps que j’étouffe, des années déjà que je me sens comme dans un étau. Je crois que les évènements de ces derniers mois, avec leur lot de restrictions et d’atteintes totalement disproportionnées aux libertés publiques individuelles et collectives ont été les évènements de trop. Hier soir, j’écoutais, ou plus précisément je réécoutais (quand ça sert à cela, Internet est un bel outil), cette émission de France Culture « Walden ou la vie dans les bois »[5] où il était question de la retraite en pleine nature de Henry David Thoreau, que nombre d’entre vous connaissent au moins de nom, j’en suis persuadée. Et alors, la chose m’est apparu dans toute sa crudité, dans toute son évidence aussi : l’homme libre devra se débarrasser de ses prothèses numériques s’il veut rester libre. Abandonner le téléphone portable pour commencer. Résilier son abonnement à Internet pour continuer et sans doute renoncer à certains services que la société réservera aux bons citoyens dotés des bons outils de surveillance et de traçage numérique. La liberté sera à ce prix. L’homme libre de demain sera un furtif, à l’image de ces entités imaginées par Alain Damasio dans son dernier roman du même nom « Les Furtifs » ; ces créatures qui se fondent dans le décor, se confondent avec leur environnement, se faufilent dans les interstices de la société, savent se rendre invisibles. Pour être libre l’homme devra se rendre invisible et donc disparaître des écrans, des radars, des fichiers.

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[1] https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/03/16/la-nouvelle-carte-d-identite-plus-securisee-sera-mise-en-service-en-aout_6073327_3224.html

[2] https://www.laquadrature.net/2021/06/08/lettre-ouverte-appelant-a-linterdiction-mondiale-du-recours-a-la-reconnaissance-faciale-et-biometrique-permettant-une-surveillance-de-masse-et-une-surveillance-ciblee-discriminatoire/

[3] https://www.laquadrature.net/2021/06/09/passe-sanitaire-attaquons-lobligation-didentification/

[4] https://www.nouvelobs.com/politique/20210603.OBS44840/l-ue-veut-creer-une-identite-numerique-europeenne-pour-rassembler-tous-vos-documents-officiels.html

[5]https://www.franceculture.fr/emissions/les-chemins-de-la-philosophie/henry-david-thoreau-24-walden-ou-la-vie-dans-les-bois

Harcelés

Ce que nous subissons collectivement depuis bientôt un an, en termes de restrictions de libertés, de contrôle social et de répression ne peut plus porter le nom de « gestion de crise sanitaire ». C’est bien autre chose. Ça va au-delà de la simple gestion de crise. Pour ma part, je vois dans cet emballement autoritaire la marque d’un harcèlement moral de masse qui n’est qu’une étape.

Ces restrictions, ce contrôle social et cette répression ne datent certes pas d’hier. Les lois sécuritaires s’empilent dans notre pays depuis une quinzaine d’années. Mais le Covid19, cette nouvelle maladie qui, aux dires d’une partie du monde scientifique et médical, va nous accompagner pour de nombreuses années, a accéléré un processus déjà à l’œuvre. Tout était là, il ne manquait plus qu’une étincelle. C’eût pu être n’importe quoi : un évènement économique majeur, un évènement écologique dévastateur, un attentat. Encore que ces évènements eussent sans doute été géographiquement circonscrits. L’avantage avec un virus, c’est que ça se répand très vite, surtout à l’heure où chaque jour, se sont plus de 100 000 vols qui traversent le ciel partout sur la planète.

Attention ! Ne cherchez pas à lire dans mes pensées et à me faire dire ce que je ne dis pas. Je ne pense pas que la crise sanitaire actuelle s’inscrive dans un plan savamment ourdi par des élites machiavéliques ou des organisations secrètes (même si je ne dédaigne pas, de temps à autre, me regarder un petit « Mission Impossible »). Je pense en revanche que ce virus constitue pour une partie de ceux qui détiennent le pouvoir économique et politique, une opportunité fabuleuse pour faire avancer leurs projets idéologiques. « Parce que c’est notre projet ! » Comme disait un certain candidat-président durant une certaine campagne. C’est d’ailleurs le propre même des hommes de pouvoir que d’utiliser les évènements, quels qu’ils soient et d’où qu’ils viennent, à leur avantage. C’est vieux comme le monde.

Mais revenons à cette notion de harcèlement moral. Quiconque a travaillé, a pu être confronté, parce qu’il l’a subi lui-même ou parce qu’il en a été témoin, au harcèlement moral. Les ordres et contre ordres, les injonctions contradictoires, la persécution à travers des messages mille fois répétés, la menace, les changements incessants qui soufflent le chaud et le froid, l’encadrement strict, l’infantilisation, l’exigence du respect des procédures y compris les plus absurdes,  le contrôle permanent de chaque fait et geste, les sanctions injustifiées, etc. Tout cela concourt d’abord à une grande souffrance du sujet qui subi ces comportements puis un affaiblissement, et si le harcèlement se prolonge dans la durée, il aboutit à la destruction minutieuse, lente et certaine de toute capacité de résistance du harcelé. Toute similitude avec des circonstances qui ont cours depuis une année n’est nullement fortuite. Ce que l’État, le plus froid des monstres froids, fait vivre à la population française depuis près d’un an, est assimilable à un harcèlement moral de masse.

La démocratie est mal en point et ça non plus, ça ne date pas d’hier. Comme le souligne Barbara Stiegler, philosophe qui vient de sortir un texte dans la collection tract de Gallimard, « De la démocratie en Pandémie », le démos (le peuple) a été remplacé par la population, une population dont il faudrait se méfier parce qu’elle est défiante, irrationnelle, complotiste. C’est pourquoi il faut s’en remettre aux experts. Dans un précédent ouvrage, « Il faut s’adapter. Sur un nouvel impératif politique » paru également chez Gallimard en 2019, Barbara Stiegler réalisait une sorte de genèse de l’idéologie néolibérale à travers la controverse qui fut à son apogée dans les années 1930, entre John Dewey, philosophe et psychologue, partisan d’une démocratie émancipatrice et horizontale qui s’en remet à l’intelligence collective, et Walter Lippmann, journaliste et écrivain défenseur du gouvernement des experts pour guider les masses et transformer l’espèce (humaine) afin de l’adapter à la Grande société (1).  C’est Lippmann qui a gagné la partie dans cette controverse, et l’idéologie néolibérale vantée par ce dernier, notamment lors du colloque Lippmann qui se tint à Paris en août 1938, est devenue hégémonique.

Quand l’ultralibéralisme prône le laissez-faire et réduit l’État à ses prérogatives régaliennes, le néolibéralisme, lui, envisage l’État comme un outil au service du marché. Dans cette Grande société néolibérale le citoyen est devenu un consommateur, le peuple une population de masse. Or, la masse ne pense pas, elle ne veut rien, elle ne sait rien. La masse doit être guidée, orientée. Son consentement doit être fabriqué par des médias de masse qui donnent la parole à des « sachants », ces fameux experts. Nous en sommes là.

Le gouvernement par la peur et le harcèlement moral qui l’accompagne constituent une modalité d’exercice du pouvoir parfaitement logique dans la Grande société néolibérale dans laquelle nous baignons, pour ne pas dire que nous nous y noyons. Le pouvoir qui organise cette Grande société n’aime pas le démos. Alors dès qu’une occasion se présente pour décider sans lui, et peu lui importe même que cela soit contre lui, il n’hésite pas un instant. Qui plus est, quoi de mieux qu’une population désorientée, psychologiquement épuisée par des mois de harcèlement moral, pour faire passer n’importe quelle décision, n’importe quelle loi, n’importe quel règlement ? Même la démocratie représentative est mise entre parenthèses, puisque les pouvoirs du parlement sont considérablement amoindris, pour ne pas dire confisqués en ces temps d’état d’urgence sanitaire. La séparation des pouvoirs devient de fait une simple fiction juridique, puisqu’une large part du pouvoir législatif est concentrée entre les mains du Premier ministre, lequel n’est en réalité que la marionnette du vrai détenteur du pouvoir, à savoir le président de la République à la tête de son Conseil de défense dont les débats sont tenus secrets. La démocratie était bien mal en point avant mars 2020, et avec la loi du 23 (2) instaurant l’état d’urgence sanitaire, elle est désormais agonisante.

  1. La Grande société : elle se caractérise par la division du travail, le développement du commerce international, des métropoles et mégalopoles.
  2. Loi du 23 mars 2020 instaurant l’état d’urgence sanitaire : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000041746313/

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