A toi qui te crois riche
Alors qu’à cette heure jeune
Tu es juste encore à l’abri.
De quoi ?
Mais de la misère l’ami !
De celle que tu n’oses pas regarder
De peur qu’elle te saute au visage
De celle que tu méprises
En croyant ainsi l’éloigner
De celle qui t’observe en coin
Qui jauge ton aptitude à résister
Ou à lui céder.
Que feras-tu quand elle entrera dans ta maison
Sans préambule, sans autorisation ?
Quand elle salira de leurs regards condescendants
Ta fierté, ton nom, ta vie et tes enfants ?
Elle arrivera par le courrier du matin.
Dans une enveloppe tu tiendras dans ta main
Ta mise au rebut, le début de ta faim !
Suppression de personnel, licenciement,
Baisse de la masse salariale, réduction des effectifs
Tu découvriras alors que tu n’es qu’un chiffre
Qu’une ligne dans un bilan comptable
Qu’un matériel productif
Devenu obsolète ou encombrant
Trop vieux, trop cher, inutile tout simplement.
A toi qui te crois riche
Parce que ta maison est bien jolie
Parce que ta voiture porte un écusson
Parce que c’est en avion que tu pars en vacances.
A toi qui te crois de la classe des nantis
Parce que tu es cadre, petit chef de service
Maton de tes camarades travailleurs
Parce qu’on t’a donné la casquette et le bâton
Pour flatter tes pauvres illusions
Parce qu’à cette heure tu gagnes ta vie.
A toi, je veux dire aujourd’hui :
Chante l’ami ! Chante !
Car demain quand le facteur à ta porte sonnera
Demain, tu pleureras…
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